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lundi 28 mai 2012

Commentaires de français dubrevetaubac.fr : Apollinaire - L'émigrant de Landor Road -



Apollinaire - L'émigrant de Landor Road - 


*** Etude d'un membre du forum 
Commande d'un entretien




lntroduction
- Le theme de l'angleterre est un theme central dans Alcools. << I'emigrant... » a été écrit entre 1904 et 1905 et s’inspire du second voyage d’Apollinaire ä Londres en mai 1904.A cette époque son amie Annie Playden, avec qui il a eu une liaison lorsqu’il se trouvait en Allemagne, est retourne vivre chez elle en Angleterre. C’est parce qu’elle a decide d’emigrer en Amerique que le poete la rejoint, esperant sans doute parvenir ä une recontiliation. Le texte reste empreint de cet echec amoureux.
- Le texte est publie fin 1905 mais en 1906 i1 sera reecrit successivement en prose puis ä nouveau en vers. il s’agit d’un poeme post-symboliste qui mele un recit humoristique et bizarre à une description
plus nostalgique.

l) Recit d’un poete déraciné
1 Structure du texte : c'’est un recit
- Composition relativement reguliere du texte : 13 5 composees le plus souvent d'alexandrins sauf le
vers 10 un octosyliabe
et 1a ä 6 composée d’hexasyllabes‚ (seules les 5 8, 11, 12 sont irrégulières mais elles sont en dehors
de notre étude).V.9-10 << Mon bateau partira demain pour l’Amérique
Et je ne reviendrai jamais »
- Le recit de ce départ se fait tantôt à la troisième personne v.1 << Le chapeau à la main il entra du pied droit >> tantôt à la première personne v.9 << Mon bateau partira demain pour l’Amerique >> ) quand il s‘agit d’un monologue intérieur. Ceci contribue à la complexité du texte mais rend aussi le narrateur plus distant du lecteur. On note une sorte de détachement du poete qui est tantôt auteur tantôt observateur dans cette double perspective révélatrice des recherches esthétiques du simultaneisme.
2 Éléments de vie d’Apollinaire
- Le titre est en soi une reference explicite à la vie d'apollinaire. En effet, Landor Road est la rue dans laquelle vivait Annie
Ce qui signifie qu’elle a pour le poete une connotation sentimentale : v. 12 « guider mon ombre aveugle en ces rues que j'aimais ».
- Une autre reference directe ä la vie du poete se trouve dans le portrait d’un « emigrant ». Ce n’est
certes pas Apollinaire qui part pour l'Amerique en cette annee 1904, mais Annie Playden sans doute
pour échapper au poete. Lui-même a-t-il pense a la suivre
- Apollinaire fait également reference dans le texte a son activite de poete qui doit lui permettre
d'envisager son départ : v. 11
« Avec l'argent gagne’ dans 1es prairies lyriques >> << Les boursiers ont vendu tous mes crachats d’or fin ». Ce qui est notable, c'est que le poete associe ä cette activite poétique « prairies lyriques >> et << fin » (=> quelques vers précieux) une connotation financiere << l'argent gagne »‚ « les boursiers
», << crachat d’or fin >> . On retrouve ici un des traits de
la modernité du recueil qui fait regulierement reference a l’argent‚
- D’une manière plus large on note dans le texte des elements de la vie anglaise que le poete a relevés. Ainsi fait-il dans 1e v.2 << chez un tailleur tres chic fournisseur du roi >> reference a la vie londonienne, (peut-être Harrocfs oü s‘habille la famille royale ou encore une boutique sur Band Street) ou bien encore evoque-t-il un « lord
>> au v.19.
3 La solitude
- C’est le sentiment qui domine le texte un emigrant apparait seul au milieu de la faule : v.5 et 6.
expression « des ombres sans amour » V.6 dénote une deshumanisation tandis que le verbe « se
trainait » v.6 renforce le trait négatif.
L'ensemble renvoie a la froideur de la foule mais aussi des << mannequins >> du v.4.
' Noye dans une foule indifférente, l'emigrant se trouve confronte à une impression de confusion. Ceci est renforce dans la v.5‚ par une alliteration en m << remuait en melant », ainsi que dans les vers 6„ 7, 8 par l'emploi à trois reprises de l'article indefini << des » : « des ombres...des mains... des oiseaux ».
- C’est aussi le Sentiment de solitude qui pousse le poete à faire part de son regret du passe. A ce
sujet l'ensemble de la v6 est évocatrice de cette nostalgie : v.21/24 « Au dehors les années
[.. .] passaient enchainées >>.


Il) Un voyage placé sous de mauvais augures
1 Un humour dérangeant
- Le texte par moments fait preuve d’un certain humour pour le moins surprenant, qui n’est pas sans rappeler le << nonsense »anglais. Ainsi aux v. 3, 4, 17 et 18 la référence à des mannequins décapités ne manque pas de surprendre par son aspect
saugrenu et de mauvais goût [même si le thème est récurrent dans le recueil cf. : <4 soleil cou coupé » à la fin de << Zone].
Noter au v. 17/18 l'allitération en quelque peu comique phonétiquement‘ Le burlesque apparaît aussi dans l'évocation de superstitions, comme celle du vers 1 «il entra du pied droit »‘
Supposé porter chance, cette précaution semble dérisoire par rapport à tous les signes négatifs dans la suite du poème.
2 - Un départ définitif
' Le poème évoque un décor maritime t v.8 « comme des oiseaux blancs » et plus particulièrement le départ des migrants vers l’Amérique : v.9. Le nouveau continent est présent également dans la première partie de ce texte avec une évocation exotique au v.l6 << pleins d’oiseaux muets et de singes ».
- Le départ du personnage est clairement annoncé comme définitif: v.10 « Et je ne reviendrai jamais ». Le vers 13 à ce propos peut sembler plus obscur « Car revenir c’est bon pour un soldat des Indes ». On peut supposer cependant qu’Apollinaire fait allusion ici à un poème de l'écrivain anglais Rudyard Kipling intitulé « Mandalay » et qui était paru en 1904 dans la revue Les soirées de Paris (et dont Apollinaire s’occupait). Ce départ est espéré comme un renouvellement total de l'être, une régénération (cf. thème du phœnix) : « mais habillé de neuf» v.15. Il semble que le décor l’incite au départ comme par exemple cette foule indifférente qui lance des sortes de signes d’adieu : '
v.7/8 « Et des mains vers le ciel plein de lacs de lumière
S’envolaient quelquefois comme des oiseaux blancs »
On note d’ailleurs que, dans ces deux vers, les présages sont encourageants de par les connotations positives de << ciel », «lumière », << oiseaux blancs » ce qui ne sera plus du tout le cas dans le reste du poème3! Les présages de mort
- On relève dans le texte de nombreux signes avant-coureurs qui présagent la mort du personnage. Ainsi au v.l9 est-il
amené à porter les vêtements d’un mort
s En fait dès le début le champ lexical renvoie à la mort dans l'évocation :
- De la ville et de son activité :
v.3 « couper quelques têtes » ; v.23 « les mannequins victimes »
4: références morbides, même si elles sont par leur excès empreintes d’un certain humour.
- Dans l'expression de la solitude et du manque :
v.6 « des ombres sans amour » ; v.l2 « mon ombre aveugle »
<=> l'ombre est un euphémisme pour désigner un mort et l’on note que le personnage semble déjà privé de ses sens : «aveugle ».
Dans la description d’un exotisme morne ou inquiétant : v.16 « pleins d’oiseaux muets » 4=> même les merveilles du nouveau continent ne peuvent apaiser l'inquiétude et là aussi les oiseaux souffrent d’un manque de mauvais augure.
‘ Ce départ n’est donc pas celui auquel le poète pourrait s’attendre et les nombreux signes funèbres contrebalancent les quelques notes d’espoir contenues dans la première partie du poème. La fin de celui-ci ne fera que confirmer le mauvais présage comme on le voit très clairement dans les deux derniers vers :« Des cadavres de jour rongés par les étoiles
Parmi le bruit des flots et les derniers serments »

Conclusion -
Nous sommes en présence d’un poème à tonalité mixte, ll mêle les éléments amusants ou bizarres à d’autres beaucoup plus
mélancoliques. Le pressentiment négatif du poète se trouve accentue’ par la douleur de l'amoureux esseulé.
- Ce poème quoique moderne sur bien des aspects reste assez classique dans son écriture. Le texte est le plus souvent rime,
généralement composé d’alexandrin réguliers aux hémistiches.
- La modernité du texte se trouve donc davantage dans la thématique et dans l'évocation surprenante de certaines images.
Apollinaire transpose d’une certaine façon l'échec amoureux en échec d’un départ.

Commentaires de français : Apollinaire - Automne malade Agollinaire - Alcools...



Apollinaire - Automne malade
Agollinaire - Alcools - Automne malade - analyse

INTRODUCTION

De Ronsard à Prévert, en passant par Chateaubriand, Baudelaire et Verlaine, l'automne a inspiré des
générations de poètes. Né, quant à lui, sous le signe de la Vierge qui marque le début de l'automne,
Apollinaire a fait de cette saison, associée souvent au temps qui passe, a la mort, aux souffrances de
l’amour et, partant, aux fins des amours, sa saison privilégiée. ll s’ecrit d’ailleurs : << Mon automne
éternelle ô ma saison mentale ». Dans le poème << Signe >>, il rappelle cette idée : << Je suis soumis au
chef signe de l’Automne ».
C’est pourquoi Automne malade s’inscrit naturellement dans cette optique. ’

I. La thématique de l'automue renouvelée par l'univers personnel du poète

D’emblée, dès la première strophe, l'automne, affublé de l'épithète << malade », s’inscrit dans le thème
de la maladie et de la mort. Apollinaire, interpelle cette saison qu’il aime entre toutes et lui signifie sa
fin prochaine : « Tu mourras (à l'arrivée de l’hiver) : quand l'ouragan soufflera dans les roserais ;
quand il aura neigé dans les vergers.
ll lui signifie en même temps sa sympathie (étymologiquement, "sympathie" signifie : "souffrir avec")
par l'adjectif << adoré >> et pour sa remarque pleine de commémoration : << pauvre automne ».
Remarquons également que les symboles de la vie sont ici « les roserais » et << les vergers », reflets de
la splendeur de la nature. ‘
Ajoutons aussi qu’il évite toutefois de reprendre de manière trop explicite le cliché romantique de la
souffrance humaine accordée au deuil de la nature.
Deux champs lexicaux vont {affronter dans ce poème :
‘ Au champs lexical de la splendeur automnal («Vergers >>, « richesse », « fruits mûrs », « fruits >>, <<
cueillir», et << adoré » - où l’on retrouve << - doré» comme l’or des feuilles mortes), s’oppose celui
de l’hiver destructeur aux portes de l'automne finissant (<< malade », << aura neigé >>, << blancheur », <<
neige », «tombant »).
- Mais, à mon sens, le champ lexical dominant est celui de la Mort (deux occurrences : << Tu mourras
», << meurs ») et de ses symboles comme les << éperviers » qui planent, aux lisières de la Mort, celui del'éloignement (<< aux lisières lointaines ») ou de la tristesse (« les cerfs ont bramé »).
‘ Les mots relevés ci-dessous sont par couples contrastés aux vers 1/3, 4/6/7 et 15 :
- << Malade >> et « adoré » au vers 1 ;
- Au vers 2, l'image de << l'ouragan » soufflant sur << les roseraies » a imagé ce couple beauté fragile (<<
les roseraies >>)/rudesse des éléments‘ (<< l'ouragan ») ;
- Au vers 6, « en blancheur» (« neige »)/<< richesse >> ;
- Au vers 7, « de neige >>/<< et de fruits sûrs >> ;
- Au vers 15, << fruits tombants >>/<< cueille ».
- Mais ce sont les vers 8 à 10 qui lèvent le voile sur le sens caché de l'élégie : -
<< Au fond du ciel
Des éperviers planent
Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines
Qui n'ontjamais aimé »
« Ces nixes nicettes aux cheveux verts et naines qui n’on jamais aimé >> nous rappellent les << sept
femmes aux cheveux verts » de "Nuit rhénane", d’autant que les << nixes » sont les ondines de la
mythologie germaniques, qualifiées de << nicettes », cest-à-dire de simplettes, et de << naines >>, ce qui
achève de leur donner un aspect inquiétant.
Par rapprochement avec "Nuits Rhénanes" et "La Loreley", on comprend que ces créatures
mythologiques sont une nouvelle incarnation de l'amour-danger, de l’amour impossible, non partage’
de ces deux poèmes. Cela rappelle également l’<< ombre fatale » de << Vépouse qui me suit» rencontrée
dans le << signe >> automnal (<< Le vent et la forêt qui pleurent/toutes leurs larmes en automne feuilles à feuilles »), redisent toute la tristesse du mal d’amour. Le poète retourne donc à son profit la thèse
rabattue de l'automne comme il a enrôlé dans sa poétique la légende de la Loreley.
Dans les deux cas, il trouve dans ces sujets un écho de sa souffrance de mal-aimé. C’est ici, sous le
mode de la complicité avec la nature, thème événement romantique que le poète, à la suite de
Verlaine, a débarrassé de tout pathos grâce à une prosodie alerte qu’il convient d’étudier dans le
second axe.
Il. Un poème d’une musicalité libre, propre à Apollinaire
Cette élégie musicale, dont la parenté avec la poésie de Verlaine est indéniable, semble s’inspirer du
précepte de ce dernier dans son Art Poétique : « De la musique avant toute chose ».
Les sonorités du vers tendent à composer un tableau sonore en harmonie avec les images.
- A la force de « l'ouragan » dont « le souffle » trouve son équivalent dans le << brame du cerf» et les «
pleurs du vent», participant les assonances et allitérations en ou/ra/gan du vers 2 ;
° La récurrence telle celle du mot << automne » aux vers l, 5 et 17 :
- << Automne malade >> et « adoré >> ;
- << Pauvre automne » ;
- « Toutes les larmes en automne feuille à feuille ».
° Le balancement « que j’aime »/<< que j’aime » au vers 14 ; ,
- Les couples symétriques (<< en blancheur et en richesse », << de neige et de fruits mûrs », << feuilles à
feuilles ») créent un rythme régulier au sens d’un prosodie pourtant très libre.
On sait que les poèmes polymétriques présentant un mélange de vers différents sont assez
caractéristiques que la manière d’Apollinaire.
Dans ce poème, l'octosyllabe est privilégié car figurant aux vers l, 6, 15 et 16. l'alexandrin, quant à
lui, revient à trois reprises :
- Vers 10 : << Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines >> ;
- Vers 14 : << Et que j’aime ô saison que j’aime tes rumeurs >> ;
- Vers 17 : « Toutes leurs larmes en automne feuilles à feuilles ».
On est surpris de constater que dans le recueil Alcools, plus de la moitié des poèmes respectent les
règles de versification et privilégient l'alexandrin. e
Pourtant, dans ce poème, Apollinaire recours aux vers les plus disparates du vers de 14 ou 15 syllabes
au vers 2 : << Tu mourras quand l'ouragan soufflera dans les roseraies ». Il reste que l'alexandrin le
plus remarquable du poème est celui du vers 14 (<< Sur les nixes nicettes aux cheveux verts et naines»)
dont la régularité contrastée avec les sonorités acidulées en [i] (<< les n[i]xes n[i]cettes »). l'effet
recherché vise à renforcer au cœur de ce paysage automnal, l'élément négatif que constitue l'image
des « éperviers », liées à celle des << femmes qui n’ont jamais aimé ».
Quant à la dernière strophe qui se présente sous l'apparence de six vers de deux syllabes :
<< Les feuilles
Qu’on fouille
Un train
Qui roule
La vie
S’écoule »
On peut découvrir ici un alexandrin verticalisé de 2 + 2 + 2 + 2 + 2 + 2 = 12 syllabes. On doit y voir
une visualisation de la chute des feuilles et de la fuite inexorable du temps, selon un procédé utilisé par
Apollinaire dans ses célèbres calligrammes.
CONCLUSION GÉNÉRALE
Sur un thème qui l’a inspirée abondamment, le poète d’Automne malade, même s’il est << beaucoup
plus proche de Verlaine et des poètes du XIXe siècle que des poètes modernes, joue avec subtilité des
suggestions et des fantaisies formelles pour que son texte porte son empreinte très personnelle
.